Management à distance : un gros défi pour les managers

Un article de Françoise Ferrua-Pupin et Olivier Heisch| Illustration : Alexis d’Agier
Nous sommes dans une situation de confinement plus difficile à vivre que la première : le sentiment d’un échec collectif, la lassitude de l’enfermement, l’incertitude sur la fin de cette crise sanitaire, la prévision d’une crise économique grave qui se confirme déjà dans les faits et les annonces, etc…
Avec la distanciation physique, nous perdons la majeure partie de nos repères sensoriels dans nos interactions, ce qui génère naturellement une perte de contrôle, voire de maîtrise des opérations…cela peut produire un grand sentiment d’insécurité, altérer notre confiance, notre efficacité, notre plaisir, et mettre sous risque notre performance.
« Loin des yeux, loin du cœur » nous perdons une partie du lien émotionnel créé par la spontanéité et les rituels collectifs informels, la pause-café, le déjeuner, l’afterwork, qui généraient de la joie et permettaient de percevoir l’état émotionnel des collègues, de se confier, de se donner du feedback, de s’encourager.
La visio n’a pas tout résolu : nous vivons dans un monde très visuel d’accord, mais la visio a ses limites puisqu’elle ne comble pas entièrement nos frustrations sensorielles. Elle demande une grande concentration, certaines personnes se disent épuisées après des heures de réunion.
Dans ce contexte, exercer notre métier avec autant de plaisir et de performance est difficile. Nous devons réinventer chacune de nos actions pour retrouver la maîtrise, la confiance, le plaisir relationnel, et la performance. Pour le moment, nous sommes dans le chaos de cette transformation. Nous réapprenons à travailler.
Pour les managers dont l’équipe est mise à distance, tout se complique. L’éloignement limite les échanges informels et spontanés, les situations d’accompagnement et d’observation. C’est difficile à gérer car c’est leur job d’être en permanence en interaction avec leurs collaborateurs :

  • Comment trouver le bon niveau de contrôle et de confiance, en donnant les bons conseils et les bons feedbacks, alors qu’il est moins aisé d’évaluer le niveau d’autonomie ?
  • Comment trouver la bonne fréquence d’interaction et le bon degré dans l’intimité de la relation, alors que le moindre appel peut être perçu comme un acte de management ?
  • Comment s’en sortir dans ma communication avec mon équipe, alors que je suis déjà noyé par les mails, les sms, WhatsApp, les chats, les visio ?
  • Comment organiser des réunions qui donnent de l’énergie aux collaborateurs alors qu’ils sont tous réduits à l’état de vignette sur un écran ?
  • Comment intégrer les nouveaux collaborateurs à la vie de l’équipe et la culture de l’entreprise alors qu’ils ne peuvent même pas y rentrer ?
  • Comment accompagner les peurs, le stress, les angoisses des collaborateurs, alors qu’on n’est soi-même pas à l’abri d’un avenir incertain ?

La liste est très longue. Et si de surcroît il leur est demandé de gérer des projets délicats, par exemple une réorganisation, cela va dramatiquement l’allonger.
Bien entendu on trouve des exemples de réussite, mais globalement c’est très chaotique. Plus que toute autre la fonction managériale doit se réinventer et les managers d’équipes être chouchoutés, écoutés, accompagnés dans l’apprentissage de leur nouveau métier. Il est grand temps d’assumer que nous vivons dans un nouveau monde et qu’il faut les aider à y trouver du plaisir et de la performance.
Enjoy Transformation !